Au Vietnam, il existe une religion minoritaire fondée en 1919 et appelée le caodaïsme. « Et alors ? », me direz-vous. Eh bien cette religion a pour guide spirituel – entre autres – Victor Hugo.
Mais comment l’écrivain français s’est-il retrouvé au cœur d’une religion, à l’autre bout du monde ? Commençons par la base : le caodaïsme s’appuie principalement sur trois religions qui ont imprégné l’Asie orientale, à savoir le confucianisme (fondé sur des principes comme la bonne conduite, la sagesse et les relations sociales saines), le taoïsme (recherche de la plénitude et de la sérénité par le détachement et par un certain comportement intérieur et extérieur) et le bouddhisme (tentative de réponse à la question de l’existence et du devenir de l’homme). Un sacré bricolage autour du syncrétisme religieux !
Les personnages révérés par les fidèles de la religion caodaïste sont également appelés « guides spirituels ». Ils sont puisés dans toutes les cultures, notamment parfois aux sources européennes. Ainsi, on trouve aussi bien parmi eux Confucius, sage chinois, Bouddha, Jésus-Christ, que l’écrivain Victor Hugo, Jeanne d’Arc, Pasteur, Churchill, Lénine ou Shakespeare.
Cette allusion à Victor Hugo pouvait avoir pour objectif « de faire bonne figure [auprès des] autorités coloniales et correspond[ait] en même temps aux discours politiques des Vietnamiens prêchant une émancipation progressive du joug colonial » explique l’association AAVF, qui œuvre pour le développement des relations entre la France et le Vietnam.
Le caodaïsme n’est d’ailleurs pas le premier mouvement vietnamien à avoir fait référence à des auteurs occidentaux. Ainsi les modernistes néo-confucéens qui appartenaient au mouvement Duy Tân (1905-1907) se nourrissaient déjà des idéaux des Lumières (Rousseau, Montesquieu, Voltaire, etc) pour faire valoir leurs thèses réformistes. Les instigateurs de ce mouvement pensaient « que la domination coloniale [pouvait] représenter une chance historique à saisir pour renouveler complètement le pays et ses substrats d’archaïsme », rapporte l’association AAVF.